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Lorsqu'on parle de biographie, on pense souvent seulement aux récits de vie de personnes célèbres. Bien d'autres vies, et événements traversés par des quidam, méritent pourtant qu'on en garde la mémoire. Je pose ici de temps à autre ce qui au fil des jours m'inspire...

La photographie, toute une histoire

Se tient en ce moment en Suisse à la fondation Beyeler (Riehen) une exposition du photographe Jeff Wall. Je n’y suis pas encore allé. Mais cette exposition a immédiatement fait ressurgir un souvenir : celui d’un week-end à Londres, en 2004. Et la découverte de l’oeuvre de J.Wall dans une exposition rétrospective à la Tate Modern. Un artiste, deux expositions, et la mémoire qui bondit vingt ans en arrière. 

Faire des bonds dans son histoire, c’est cela le travail biographique. On conçoit souvent son parcours comme un enchaînement chronologique, linéaire. Mais se souvenir, c’est aussi trouver des liens inattendus, que l’on n’avait peut-être jamais fait auparavant. Le biographe accompagne cette navigation dans la mémoire. 

Mais revenons à Jeff Wall. J’étais loin d’imaginer il y a 20 ans que je deviendrais biographe. Même si rétrospectivement je suis aujourd’hui capable d’expliquer mon cheminement. Avec J. Wall, je découvris que la photographie, au-delà de sa capacité à arrêter le temps, m’intéressait surtout par l’imaginaire qu’elle enclenchait. Il y a bien évidemment une histoire derrière chaque photo. Mais il y a dans le travail de J. Wall cette volonté évidente de faire de chaque image une petite bombe romanesque. Comme autant d’incipits à des romans qu’il nous laisse libre de construire. 

Nourriture et mémoire émotionnelle

Dans un article du journal Libération, Yotam Ottolenghi, chef né en Israël, connu pour avoir popularisé en Europe des recettes du Moyen-Orient, raconte : « La nourriture est un outil très efficace et émotionnel pour préserver la mémoire et toute personne qui a migré peut dire à quel point il est important de pouvoir recréer la nourriture du passé dans un nouveau contexte, de se connecter à son origine par la nourriture ». 

Une belle inspiration pour le travail biographique. Evoquer ses souvenirs culinaires pour retrouver une connexion avec son passé. 
 

L'a posteriori biographique 

Un des grands plaisirs de la lecture est la rencontre, toujours surprenante, avec la formulation exacte d'une idée. Un de coup de foudre qui oblige à s'arrêter, à relire alors plusieurs fois cette phrase-écho dont la perfection nous méduse. 

Dans Glose, Juan José Saer, auteur argentin exilé à Paris, définit «ce que les autres appellent vie [comme] une série d’explorations a posteriori où une dérive aveugle, incompréhensible et sans fin dépose, à mesure et malgré eux, les individus, même éminents, qui, après avoir été emportés par elle, se mettent à élaborer des systèmes qui prétendent l’expliquer». 

Belle invitation à la modestie. Le travail biographique, comme la vie, est une exploration qui, faute de pouvoir toujours expliquer, dessine des liens, tente d'élaborer une cartographie imparfaite d'un soi-monde. 

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